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sac à dos
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- IV- Argentine

Dimanche 16
Nous descendrons par une piste empruntée et défoncée par le Dakar, sur Cafayate. On
verra bien. Sofia est très étonnée que je conduise. Pourtant il n’y a rien d’extraordinaire. La
piste est large, sans ravin. Le plus embêtant se serait la panne, mais la voiture est presque
neuve. Nous nous partageons la route poussière tôle ondulée. Un dentier se décollerait !
Nous longeons des couches de sédiments séchés tordues plissées soulevées en drapés en

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tranche. C’est ocre, terre de sienne, violet. Nous traversons des gorges de pierre noires ou
prune. Et c’est désert. Nous faisons un petit détour sous une chaleur de plomb pour aller
dans un village plat blanc et vide, à l’heure de la sieste. Nous nous garons devant
l’ « hospital ». Si ce n’était pas écrit je ne m’en serai pas douté. Heureusement que Mana
n’était pas bien malade ! Au hasard d’une petite rue brulante nous trouvons les meilleurs
empanadas du voyage dans un charmant patio sous une treille de vigne. Les murs sont un
fantastique bric à brac où le moindre clou est exposé comme objet d’art. Le vieux patron
sous son beau chapeau sort sa guitare mal accordée, c’est trop charmant de grincement, et
nous chante de sa voix haut-perché à la Tino Rossi, quelques airs du folklore argentin. Le vin
est une horrible piquette.
Cafayate. Une armée de jeunes sacs à dos, routards junkies argentins français et du monde
entier surtout Europe (quelques asiatiques, pas de noirs) déambulent ou s’affalent au milieu
des enfants qui courent, et des chiens, sur la place….du 9 julio ou de mayo ou san Martin ou
Belgrano. Je ne sais plus mais ce sont toujours les mêmes noms. Des ânes des vélos des
tandems à 2 places, à 3 places, font des tours. Des tas de boutiques souvenirs, et des tas de
restaurants ou j’ai bu un délicieux vin blanc, un Torentès. Nous ne sommes plus dans le
désert. Ça n’a pas le charme de Cachi, mais c’est pas mal tout de même. Nous sommes dans
un très bel hôtel. C’est le luxe ! On a la télé ! Ils sont morts de rire* ! On a regardé un Disney
charmant, et quelques étapes du Dakar. Devant notre chambre, sous la galerie qui fait le
tour des chambres, un vieux marcheur tri sa cueillette : filles de l’air et cactus………..
*je HAIS la télé
Lundi 17
Un gros orage cette nuit, que je n’ai pas entendu ! En principe nous montons vers le nord,
par un canyon aux formes extravagantes, à Salta. Puis vers Humahuaca. J’adore ce mot.
Nous avons pris le temps de faire un petit tour d’une heure dans le  canyon « del Colorado »
tout au début de la quebrada. C’est rouge extravagant difforme immense désert. Les bébés
cactus poussent en se suivant comme des chenilles processionnaires dans le sable. Les
scarabées solitaires pressés maladroits et hagards courent bras tendus en avant. Un lézard
rose échappe à Ludo qui ne fait que le caresser. Une drôle de poule huppée de rouge
s’envole des épines sous nos pieds. Des insectes agaçants attaquent Mana. Il y a des cailloux
multicolores sur les gros rochers rouges qui moutonnent en terrasse le long de la rivière
asséchée. La pluie de cette nuit s’est déjà évaporée sous le soleil et le vent et laisse une
croûte rosée qui craque. Mais nous avons de la route. La voiture est toujours là. Je conduis.
Ils dorment, ou se reposent. C’est grandiose, tout est fluo : les oranges les rouges les grenats
les violets, et puis un peu de blanc …..pour le « faire valoir » comme dans les jardins ! C’est
énorme c’est haut c’est plissé c’est acéré. C’est BEAU. Comme ça jusqu’au plateau qui nous
mène, trop vite, à Salta.
Là, je finis par exiger de prendre le temps d’organiser la suite du voyage. Je ne veux pas me
retrouver en rade à Salta qui n’a d’intérêt que la place du 9 julio et ses jus d’orange. C’est

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maigre. On attend que la sieste soit fini…. 16h30…en flânant devant des jolies boutiques
fermées et en mangeant italien.
Aeroline Argentinas. On boucle.
Avion Salta/Bariloche, Mana est toute contente de s’y arrêter, je leur en ai tellement parlé.
Mais nous ne pourrons pas aller au «  doigt de Dieu ». Il faut une barque pour aller sur le site
d’escalade.
Bus Bariloche/El Calafate. Tous contents ! On part à 9 h on arrive à 13 h ! SAUF QUE
…………c’est le lendemain ! Ça fait 28 h de bus !!!!!!!!!
Nous ne savons pas encore comment nous rejoindrons Ushuaia. Nous aurions voulu en
bus, ce n’est pas très long, une dizaine d’heures peut-être plus, c’est si grand l’Argentine,
mais le Chili bloque la frontière. Je ne comprends d’ailleurs pas pourquoi cela nous concerne.
Sur la carte je ne vois pas qu’on passe au Chili. Il faudra pourtant bien que nous allions à
Ushuaia. D’abord nous avons nos billets Ushuaia/Buenos Aires et puis c’est tout de même le
but de ce voyage ! Bof, on verra bien.
Nous avons repris la route assez tard. Nous nous perdons un peu dans Salta qui est une ville
de 700 000 habitants, très étendue. On se chamaillerait bien un peu. Il faut dire que c’est
compliqué. Il y deux routes pour aller à Jujuy, (une grande ville sur la route du nord et des
Purmamarca, Humahuaca…..), l’ancienne qu’on veut et l’autoroute qu’on ne veut pas. Les
panneaux indicateurs disparaissent régulièrement et avec leur jeu de sens unique on est
coincé ou on tourne en rond. Un monsieur est presque sûr que c’est à droite …..Sauf que
c’est à gauche. On fait 3 fois le tour d’un rond-point. Une jeune femme dit que c’est « muy
complicado » et va chercher son frère qui nous fait des beaux croquis. C’est parti ! Ouf ! 1 h
pour se sortir de Salta. Je me demande si nous arriverons ce soir à Humahuaca comme
prévu. Et où nous dormirons.
Nous montons dans la jungle par une route étroite, vraiment très étroite. Il parait que je
roule trop vite. Mana fait remarquer que je suis en seconde dans tous les virages. Merci !
Ludo trouve qu’ils ont décidé d’asphalter un sentier et que du coup ils ont mis des lignes au
milieu et sur les côtés. C’est vrai que de ses grands bras il va de la ligne du bord à celle du
milieu ! Juste la place de la voiture qui est petite. Mais la route est très bonne, les bas-côtés
sont très bons, au cas où, et il n’y a personne, sauf quelques rares autochtones aux mines
d’indiens dans des vieilles américaines des vieux pick-up qui roulent à 2 à l’heure. Il parait
qu’en Inde c’est pire : ce n’est pas plus large, il y a des ravins, plein de trous et plein de
monde qui va vite !
La jungle c’est sur les pentes de la montagne comme un filet serré de verdure luxuriante
jeté sur la cime des grands arbres.
Arrêt changement de chauffeur qui devient arrêt pipi. Le silence épais transpercé par des
cris stridents de bêtes qu’on ne voit pas, le bruit d’une scie d’une cloche, un petit chemin qui
plonge dans le ravin, puis deux puis trois. Tout un monde en bas, des hommes des
troupeaux. Insoupçonnable ! Elle est habitée la jungle. Ludo est maintenant au volant. On
rencontre des chevaux, il descend la vitre et « leur parle ». On rit beaucoup. On descend
vers une vallée. Moins d’arbres, et des petites fermes d’indiens aux maisons de terre et de

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paille. Mana fait stopper pour toute une famille de petits cochons qui tètent en trottant sous
le ventre le leur maman fuyant devant l’appareil de photo. Puis c’est tout un « parc
aménagé » où des gens se promènent autour d’un lac dans le soleil couchant. Il est déjà 8 h.
Nous n’avons pas été vite dans la jungle. A ce rythme nous ne serons pas à Purmamarca et
encore moins à Humahuaca, avant 23 h. Et nous n’avons pas d’hôtel. On va dormir à Jujuy.
Ahurissant Jujuy* ! Paris et son périph au sortir de la jungle. Des bagnoles des camions des
lumières du monde partout, et on ne sait pas trop où on va. On vise le centre-ville et on
demande à un flic, qui nous indique un parking et nous met en garde contre les voleurs ! Dès
qu’on est plus à la campagne ! C’est comme partout quoi. Dans le Gers on peut laisser la
voiture ouverte. Pas à Nice. Nous nous garons dans le grand parking d’une espèce de Nice-
Etoile, nous planquons toutes nos affaires dans le coffre, pas loin de la cahute du gardien,
nous prenons une brosse à dent, nos affaires précieuses, et nous sortons à la recherche de la
première adresse du routard. Pas de place. On nous envoie à l’office du tourisme qui est
encore ouvert à 21 h. Finalement ça fait râler leur sieste quand on veut faire des courses,
mais le soir tout est ouvert drôlement tard. Nous atterrissons dans un hôtel minable. Les
serrures sont difficiles. Il parait qu’à leur retour ils n’auront aucun mal à être cambrioleur
tant ils se seront battus avec toutes les clés, plates et asymétriques, de tous les hôtels
dortoirs chambres placards….. Dans ma chambre ça pue la friture. La salle de bain est
impeccable, c’est bien ça ! On va manger une pizza surgelée dans un tout petit restau pas
loin. Un père terrifie du regard sa petite fille pleine de larmes silencieuses, sous les yeux
indifférents de la mère ! J’ai froid dans le dos de ce qui doit se passer ailleurs…
*230 00 habitants
Mardi 18
Fuyons l’hôtel Avenida et son petit déjeuner aux cucarachas !
Et oui plein de bébés cafards dans le chocolat !
Nous sortons sans trop de difficulté de Jujuy vers le nord, Purmamarca et la quebrada
d’Humahuaca, où nous dormirons. Nous avons changé nos plans, pas très fixes d’ailleurs.
Humahuaca est à 3 000 m. Ludo préfère que nous y dormions avant de nous lancer dans le
col des nuages à 4 127 m, pour acclimater Mana. C’est très beau ce grand plateau cultivé le
long de la rivière bordée de quelques grands arbres, ces montagnes hautes couvertes de
prairies hérissées de cactus, ces falaises rouges orangées blanches acérées. Le soleil du
matin borde de lumière les contours des cactus des arbres des rochers. Il a plu cette nuit, et
l’air est transparent.
Humahuaca, presque la frontière avec la Bolivie. On est au bout du monde, dans les Andes.
Les vêtements colorés les chapeaux les marchés la peau tannée de ces visages indiens
d’Incas aux yeux bridés, et puis des enfants, plein d’enfants aux joues rouges et rondes sous
leurs beaux cheveux noirs et brillants. Nous n’en revenons pas. Nous sommes sous le charme
malgré la grande foule des touristes et des routards « du monde entier » comme d’hab’.
Mana et Ludo nous trouve un petit hôtel, la posada del sol, absolument charmant, pour le

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prix de nos campings. C’est tout au bout d’une petite route bien poussiéreuse, au calme de
l’agitation du village. Nos chambres donnent sur la campagne. Des chevaux et des poulains
broutent et viennent nous observer, deux chiens viennent nous faire la fête à la fenêtre,
Mana voit un colibri. Au-delà, les montagnes. Nous ne voulons plus partir. Nous regardons
nos objectifs, nos billets. Nous pouvons rester 2 nuits ici. Chouette !
Je m’essouffle. Nous avons acheté des feuilles de coca à une petite vieille très bolivienne
dans le village, alors je mâchouille. Ce n’est ni bon ni mauvais, ça ne me fait rien, sauf que ça
m’anesthésie un peu la bouche !
Nous avons fait une petite rando derrière la posada del sol au soleil couchant et Mana a
bravement fait un peu d’escalade !
Nous (enfin, Mana !) bavardons avec des gens de la cinquantaine ou plus, des randonneurs
photographes, argentins en vacances. Les routards du monde sont au camping.
Mercredi 19
Je suis partie au lever du soleil refaire la quebrada de Humahuaca.
Nous avons passé hier le tropique du capricorne et je n’ai pas fait de photos. Ça ne va pas
ça ! En revenant j’ai pris un auto-stoppeur…..enfin, il s’est imposé à moi et je me suis laissée
faire pour bavarder ce que je peux avec quelqu’un d’ici. C’est un paysan qui sent le pauvre,
avec son sac à dos de l’armée la mine tanné et un grand sourire. Il habite à Jujuy, le car est
trop cher et il travaille à Humahuaca. Et la France ? Oui c’est loin, oui c’est l’hiver en ce
moment, il rêve aussi un peu. Il est fatigué et pique un peu du nez !
A mon retour, Ludovic dort encore et nous partons Mana et moi acheter un picnic pour
midi. Par hasard, nous tombons sur la fête des rois mages, en haut des grands escaliers
bordés de boutiques d'artisanat indien, dominés par un héros national indien guerrier tout
nu, et la vierge Marie. Il est tôt, enfin 10 h : il n’y a pas de touristes ; des centaines d’enfants,
des grands, et des petits dans les bras des parents, des ados avec casquette et jean sur les
hanches ; la musique plein pot, plus que ça encore, et un animateur déchainé. D’autres
animateurs animatrices organisent des jeux et distribuent à tout ce petit monde ravi : un
verre de lait et une brioche, sous la bonne garde du drapeau argentin, du guerrier, de la
vierge Marie ……….. et du Che *.